Le don manuel permet, dans un premier temps, d’éviter certains frais (frais de notaire et droits de mutation à titre gratuit si le don manuel n’est pas déclaré). Mais cette économie immédiate est souvent neutralisée par les inconvénients d’une telle donation.
Les dangers sur le plan civil
Des problèmes peuvent tout d’abord surgir lorsqu’aucun écrit, qu’il s’agisse d’un pacte adjoint ou de la déclaration fiscale de don manuel, n’a été matérialisé. Dans ce cas, des conflits peuvent survenir quant à la qualification de l’opération. Ainsi, la somme versée par un père à son fils correspond-elle à un paiement, à un prêt ou à un don manuel ? L’écrit aurait permis de qualifier de façon certaine ce versement, et donc son régime juridique. On aurait ainsi diminué le risque de conflit entre les héritiers lors du règlement de la succession du donateur.
Exemple : Monsieur X a remis à l’une de ses trois filles, par chèque, une somme de 50 000 €. Cette somme a permis à sa fille d’acquérir pour partie un immeuble, dont la valeur a doublé au jour du partage de la succession de Monsieur X. La fille bénéficiaire du versement prétend qu’il s’agit d’un prêt, et qu’elle doit donc rapporter à la succession une somme correspondant au nominal prêté (Cass. 1re civ., 4 juin 2007), soit 50 000 €. Ses deux sœurs prétendent au contraire qu’il s’agit d’un don manuel, et que la donataire doit donc rapporter une somme réévaluée en fonction de la valeur de l’immeuble acquis, soit 100 000 €.
Par ailleurs, du fait des règles relatives au rapport du don manuel, le donataire peut être tenu de rapporter une somme importante (cf. supra 3 – Le rapport du don manuel). Le recours à la donation authentique, et donc au conseil d’un expert juridique, aurait permis d’alerter les parties sur cette conséquence, et d’y pallier le cas échéant (notamment par le recours à la donation-partage).
Pour éviter ce rapport, le donataire peut être tenté de dissimuler ce don manuel à ses cohéritiers. Mais dans ce cas, si ces derniers parviennent à prouver l’existence du don manuel, le donataire subira les lourdes peines civiles du recel successoral (article 778 du Code civil).
Les dangers sur le plan fiscal
Les dons manuels n’échappent pas aux droits de mutation à titre gratuit (article 757 du CGI). Les parties sont pourtant souvent tentées de passer sous silence ces libéralités. Or, l’Administration fiscale dispose de plusieurs moyens pour faire établir l’existence de ce don. Par exemple, si a été donnée une somme d’argent qui a servi à acquérir un bien, un contrôle fiscal pourra être mis en œuvre pour déterminer l’origine des fonds ayant servi à l’acquisition. Si l’Administration fiscale a connaissance de ce don manuel, cela engendrera plusieurs conséquences.
Tout d’abord, les droits de mutation seront calculés en fonction de la valeur du bien au jour du fait générateur de la taxation (déclaration de don manuel, reconnaissance judiciaire du don ou révélation dudit don), et non au jour de sa réalisation. Par conséquent, si la valeur du bien transmis a augmenté, l’assiette des droits de mutation sera nécessairement augmentée.
Exemple : Monsieur X a, par don manuel, transféré à sa compagne des actions. Celles-ci étaient évaluées à 30 000 € au jour du don manuel. Mais, au jour de la révélation du don, elles valent 60 000 €. C’est ce dernier montant qui servira à liquider les droits de mutation à titre gratuit.
Par ailleurs, si une donation est consentie après le don manuel, pour calculer le délai de rappel fiscal, on prendra en compte la date du fait générateur de taxation, et non la date du transfert de propriété.
Exemple : Monsieur X a consenti à sa fille, en 2000, une donation qui n’a été révélée à l’Administration fiscale qu’en 2007. En septembre 2011, il consent à ce même enfant une nouvelle donation. La valeur du don manuel doit être « réintégrée » pour le calcul des droits de mutation pour la seconde donation. Cela n’aurait pas été le cas si la donation avait été immédiatement révélée à l’Administration fiscale, grâce au délai de rappel fiscal.
En outre, si les dons manuels, consentis à un héritier, sont révélés au moment du décès, ils seront ajoutés à la part nette successorale de cet héritier, augmentant ainsi les droits de mutation à titre gratuit qui sont dus.