Le changement d’usage des locaux

Bordeaux, Paris, Lille, Lyon, Marseille, Nice, Stras- bourg… nombreuses sont les communes concernées par les articles L631-7 et suivants du Code de la construction et de l’habitation (CCH) relatifs à l’encadrement des changements d’usage des locaux d’habitation. Marquées par une forte spéculation immobilière, ces villes, et plus généralement celles « de plus de 200 000 habitants et celles des départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val- de-Marne », (L631-7 al. 1 CCH) ont inévitablement pour objectif commun de lutter contre l’insuffisance de logement.

Pour ce faire, cette législation, initialement créée en 1945, a peu à peu été adaptée en fonction des politiques locales. En effet, et pour ne prendre que l’exemple de la ville de Bordeaux, c’est par une Délibération du Conseil municipal en date du 7 juillet 2017, entrée en vigueur le 1er mars 2018, que les conditions de délivrance des autorisations de changement ont été précisées. S’il n’a pas la prétention de faire le tour du sujet, le présent article permet néanmoins d’effectuer un synthétique rappel des principales règles en la matière sous forme de questions/réponses.

QU’ENTEND-ON PAR CHANGEMENT D’USAGE DES LOCAUX ?

Le changement d’usage d’un local est à distinguer du changement de destination d’un immeuble. En effet, le premier, encadré par les dispositions du CCH, consiste en la modification de l’utilisation d’un local pour lui donner une autre utilisation en tenant compte uniquement de l’affectation réelle des lieux, tandis que le second, encadré par les dispositions du Code de l’Urbanisme, consiste en la modification de ce pour quoi l’immeuble a été construit initialement conformé- ment à l’autorisation d’urbanisme (cf. annexe).

QU’ENTEND-ON PAR LOCAL À USAGE D’HABITATION ?

Défini à l’article L631-7 du CCH, le local d’habitation s’entend comme « toutes catégories de logements et leurs annexes, y compris les logements-foyers, logements de gardien, chambres de services, logements de fonction, logements inclus dans un bail commercial, locaux meublés don- nés en location (…)», le tout éclairé par le critère de la résidence principale de l’occupant. Si le doute subsiste, le critère de référence est le fichier national des propriétés bâties de l’administration fis- cale mis à jour au 1er janvier 1970. Ainsi, un local affecté à usage d’habitation à cette date sera réputé à usage d’habitation à charge pour l’intéressé d’en apporter la preuve contraire par tout moyen. Quant aux locaux construits après cette date, ils sont réputés avoir l’usage pour lequel la construction/les travaux posté- rieurs ont été autorisés.

QUELLE EST LA PROCÉDURE À SUIVRE EN CAS DE CHANGEMENT D’USAGE D’UN LOCAL D’HABITATION ?

Par principe, tout changement d’usage d’un local d’habitation nécessite l’obtention d’une autorisation préalable délivrée par le Maire au nom de la commune. Cette procédure est à distinguer de celle applicable au changement de destination d’un immeuble, lequel nécessite soit l’obtention d’une non-opposition à déclaration préalable ou d’un permis de construire en fonction des caractères du projet. Néanmoins, bien que distincts par leur définition, le changement d’usage et le changement de destination sont malgré tout étroitement liés puisque, en pratique, un changement d’usage nécessite parfois un changement de la destination. Dans ce cas, il convient de déposer deux dossiers distincts mais l’instruction est menée conjointement. Le cas échéant, les travaux de changement de destination ne pourront être exécutés qu’après l’obtention de l’autorisation de changement d’usage. Le changement d’usage d’un local d’habitation n’y échappant pas, ce principe est assorti d’exceptions :

A – Les changements d’usage dispensés d’autorisation préalable

Sous réserve que le changement d’usage soit effectué en vue de l’exercice d’une activité professionnelle/ commerciale, dans une partie d’un local d’habitation, exclusivement exercée par l’occupant y ayant sa résidence principale et ne conduisant à recevoir ni clientèle, ni marchandises, ledit changement est autorisé d’office. Une adaptation supplémentaire a été prévue pour les locaux situés au rez-de-chaussée, puis dans ce cas le changement est autorisé d’office sous les seules conditions que le changement n’engendre ni nuisance, ni danger pour le voisinage, ni désordre pour le bâti.
À cette liste s’ajoute, dans une demi-mesure, le changement d’usage effectué en vue de la location à courte durée à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile, à condition que le local constitue la résidence principale du loueur. En effet, dans ce cas particulier, le changement d’usage, s’il est accordé d’office, requiert néanmoins a minima le dépôt d’une déclaration préalable à la Mairie. À toutes fins utiles, encore faut-il préciser que l’usage projeté dans les cas susvisés doit être conforme à la fois aux dis- positions du règlement de copropriété et celles du bail le cas échéant.

B – Le changement d’usage soumis à autorisation préalable et compensation

Prévue à l’article L631-7-1 al. 1 du CCH et précisée par la Délibération du conseil municipal sus-citée, la compensation consiste en la transformation en habitation, entre unité de logements, de locaux ayant un usage autre que l’habitation, n’ayant pas déjà été utilisés à titre de compensation, se situant dans la même zone et de surfaces équivalentes, à l’exclusion faite des locaux en rez-de-chaussée. Si l’on ajoute à cela les critères d’habitabilité, de décence, d’hygiène et de sécurité incendie, force est d’admettre que la procédure de compensation, très lourde dans sa mise en œuvre, répond parfaitement aux objectifs des grandes métropoles, à savoir garantir le souci d’évaporation de la superficie à usage d’habitation. Ce mécanisme a notamment été mis en place dans la ville de Bordeaux dans l’hypothèse du changement d’usage d’un local d’habitation en location meublée de courte durée à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile, dès lors que le seuil, fixé à 120 jours de location/an, est dépassé. Dans ce cas de figure, le loueur est soumis à une double procédure et doit à la fois répondre au respect de l’obtention d’une d’autorisation préalable et se conformer aux règles de compensation. La garantie de cette règle passant par l’obligation faite aux intéressés de la publier au fichier immobilier (en indiquant à la fois l’immeuble faisant l’objet du changement d’usage et l’immeuble apporté en compensation).

En cas de vente d’un local ayant fait l’objet d’une autorisation de changement d’usage, l’acquéreur bénéficie-t-il de cette autorisation ?

L’autorisation de changement d’usage obtenue sans compensation est accordée à titre personnel. Autre- ment dit, elle cesse de produire effet en cas de vente puisqu’elle est attachée au propriétaire. A contrario, une autorisation de changement d’usage obtenue avec compensation, forte de son inscription au fichier immobilier, revêt un caractère réel et est donc définitive.

Envisagé par les articles L631-7-1 A et B du CCH le changement d’usage temporaire est-il autorisé par la ville de Bordeaux ?

Laissé à la libre appréciation des communes, le changement d’usage temporaire des locaux d’habitation à un autre usage que l’habitation, pour une durée n’excédant pas quinze ans, ne semble pas faire parti des points abordés lors du Conseil municipal de la commune de Bordeaux en date du 7 juillet 2017.

Je fais un changement d’usage sans autorisation : quels sont les risques/ les sanctions ? Enumérées à l’article 7 de la Délibération, les conséquences d’une absence d’autorisation sont les suivantes :

– Nullité du contrat
– Amende civile : 50 000 euros par local transformé
– Remise en état des lieux sous astreinte judiciaire
– Sanctions pénales : un an d’emprisonnement et/ou 80 000 euros d’amende.

Sources :

Articles L631-7 et suivants du Code de la construction et de l’habitation Délibération du conseil municipal – séance du lundi 10 juillet 2017

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