Vente d’immeuble à rénover

La vente d’immeuble à rénover fait l’objet d’un statut intermédiaire entre la vente en état futur d’achèvement et la vente ordinaire avec quelques spécificités. Son régime est issu de la loi n˚ 2006-872 du 13 juillet 2006, dite « ENL » et d’un décret d’application n˚ 2008-1338 du 16 décembre 2008.

QUEL EST LE CHAMP D’APPLICATION DE LA VENTE D’IMMEUBLE À RÉNOVER ?
Il s’agit de la vente portant sur un immeuble bâti existant faisant l’objet de travaux. L’immeuble doit être à usage d’habitation ou mixte (professionnel et habitation) ou destiné après les travaux à l’un de ces usages. La nature des travaux est précisée négativement par le décret d’application du 16 décembre 2008. Ces travaux sont ceux qui ne correspondent pas à des travaux d’agrandissement ou de restructuration complète de l’immeuble assimilables à une reconstruction, pour lesquels seul le régime de la vente d’immeubles à construire est ouvert. Il convient de rappeler que les travaux qui rendent l’immeuble à l’état neuf énoncés à l’article R262-1 du CCH sont les travaux qui portent :

  • Soit sur la majorité des fondations
  • Soit sur la majorité des éléments hors fondations déterminant la résistance et la rigidité de l’ouvrage
  • Soit sur la majorité de la consistance des façades hors ravalement
  • Soit sur l’ensemble des éléments de second œuvre suivants, dans une proportion au moins égale à deux tiers pour chacun d’eux :
  • planchers ne déterminant pas la résistance ou la rigidité de l’ouvrage,
  • huisseries extérieures
  • cloisons intérieures
  • installations sanitaires et de plomberie
  • installations électriques
  • système de chauffage (pour les opérations réalisées en métropole)
    Par conséquent, dès lors que les travaux envisagés correspondent à la liste ci-dessus, le régime de la vente d’immeuble à rénover doit être écarté au profit du régime de l’immeuble à construire.

QUELS SONT LES ÉLÉMENTS DEVANT FIGURER DANS L’AVANT CONTRAT ET L’ACTE DE VENTE ?
L’avant-contrat peut être conclu, par acte sous seing privé ou par acte authentique. Il n’existe pas de modèle type et obligatoire. Toutefois, cet avant-contrat devra mentionner sous peine de nullité les caractéristiques du bien vendu (surface, nombre de pièces…), le descriptif et délai de réalisation des travaux, le prix, l’engagement du vendeur de produire lors de la signature de l’acte authentique de vente les justifications de la garantie d’achèvement des travaux et des assurances de responsabilités et de dommages-ouvrages.
Cet avant-contrat peut être conclu sous condition suspensive, notamment de l’obtention d’un prêt pour financer l’acquisition. L’acquéreur dispose d’un délai de rétractation ou de réflexion de 10 jours à compter de la notification de l’avant-contrat signé ou du projet de l’acte de vente durant lequel la rétractation est possible sans avoir à se justifier. Le versement d’un dépôt de garantie ou d’une indemnité d’immobilisation au stade de l’avant-contrat peut être prévu par les parties. Toutefois, ce versement ne doit pas concerner une partie du prix des travaux.
L’acte de vente doit comporter un certain nombre de mentions. À défaut, la nullité du contrat peut être invoquée mais uniquement par l’acquéreur et avant la livraison. Ces mentions sont les suivantes :

  • la description et les caractéristiques de l’immeuble ou de la partie d’immeuble vendu, et, le cas échéant, la superficie carrez s’agissant d’un lot de copropriété ;
  • la description des travaux à réaliser précisant, le cas échéant, les travaux concernant les parties communes et ceux concernant les parties privatives ;
  • le prix de l’immeuble avec mention si le prix est ou non révisable et, dans l’affirmative, les modalités de sa révision, ainsi que la ventilation du prix entre le bâti existant et le montant des travaux, attestée par un homme de l’art, professionnel indépendant et impartial.
  • le délai de réalisation des travaux (date indicative). Le vendeur peut prévoir des causes de majoration du délai
    en cas de survenance d’événements fortuits (grèves, intempéries…) ;
  • la justification de la garantie financière d’achèvement des travaux fournie par le vendeur : Le vendeur doit garantir à l’acquéreur que les travaux promis seront achevés. Cette garantie est constituée par une caution solidaire émanant d’un établissement de crédit ou d’une compagnie d’assurances agréée à cet effet;
  • les justificatifs des assurances de responsabilité et de dommages souscrites par le vendeur
    Par ailleurs, devront également être annexés à l’acte de vente un plan coté du local vendu et la notice indiquant les éléments d’équipement propres à ce local.

COMMENT EST DÉTERMINÉ LE PRIX DE VENTE ?
Dans l’acte de vente on distinguera, dans le prix, celui de l’existant au jour de la vente et celui des travaux devant être réalisés par le vendeur.
La réalité de cette répartition doit être attestée par un homme de l’art. Le prix de l’existant est payé lors de la signature de l’acte de vente.
La somme des paiements relatifs au prix des travaux ne peut excéder :

  • 50 % à l’achèvement des travaux représentant la moitié du prix total des travaux
  • 95% à l’achèvement de l’ensemble des travaux
    À noter que depuis le décret du 27 septembre 2010, il est possible de prévoir des versements intermédiaires dans la mesure où les plafonds ci-dessus sont respectés.
    Le solde (soit 5% du prix) est payé à la livraison. Toutefois, il peut être consigné en cas de défaut de conformité ou de vices apparents mentionnés sur le procès-verbal de livraison prévu à l’article L. 262-3 du CCH. La constatation de l’achèvement des travaux représentant la moitié du prix total des travaux, ou de l’achèvement de la totalité des travaux, est faite par un homme de l’art tel que défini à l’article R. 262-7 du CCH. Si la vente est conclue sous condition suspensive, aucun versement ne peut être effectué avant la réalisation de cette condition conformément à l’article L. 262-9 DU CCH.

QUEL EST LE RÉGIME FISCAL APPLICABLE À LA VENTE D’IMMEUBLE À RÉNOVER ?
Les travaux à la charge du vendeur ne conduisant pas à la production d’un immeuble neuf, l’acquéreur sera redevable des droits d’enregistrement au taux de droit commun excepté dans le cas où l’immeuble concerné n’est pas sorti du champ d’application de la TVA immobilière c’est-à-dire lorsque qu’il s’agira d’un immeuble achevé depuis moins de cinq ans. Cela signifie également que lors de l’acquisition de l’immeuble par le vendeur ce dernier devra prendre un engagement de revendre pour bénéficier du taux réduit tel que prévu à l’article 1115 du CGI et ne pourra pas prendre un engagement de construire afin de bénéficier du droit fixe de 125 euros.

CONSEIL DU NOTAIRE
En conclusion, le statut de la vente d’immeuble à rénover a permis de répondre aux inquiétudes des acquéreurs et des praticiens en ce qui concerne la bonne exécution des travaux. Toutefois lorsque le vendeur conserve la charge de travaux minimes, de faible importance, ce régime reste souvent beaucoup trop contraignant et conduit, en pratique, à écarter son application notamment en repoussant la vente une fois les travaux réalisés. Le succès de la vente d’immeuble à rénover reste dont très limité.

Par Me Fanny DORLHIAC notaire à Bordeaux

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