La location en meublé de tourisme

Le propriétaire d’un bien immobilier à usage d’habitation qui envisage de le transformer en meublé de tourisme doit procéder à un certain nombre de vérifications préalablement à la location afin de s’assurer de la faisabilité de son projet.

Tout d’abord, rappelons que les locaux meublés dits de tourisme sont définis par le Code du tourisme à l’article D 324-1 comme « des villas, appartements, ou studios meublés, à l’usage exclusif du locataire, offerts en location à une clientèle de passage qui y effectue un séjour caractérisé par une location à la journée, à la semaine ou au mois, et qui n’y élit pas domicile ». Ils se distinguent des autres types d’hébergement touristiques, qui ne feront pas l’objet de cet article, notamment l’hôtel et la résidence de tourisme, en ce qu’ils ne comportent ni accueil ou hall de réception, ni services et équipements communs, ou encore la chambre d’hôte ou la résidence principale du loueur, qui fait exception au régime des meublés de tourisme. Afin de préserver une offre de logements abordables réservés à la résidence principale des habitants des centres villes, menacée par l’expansion incontrôlée de la location touristique via Internet, les pouvoirs publics ont renforcé l’encadrement de la location en meublé de tourisme. Hormis l’autorisation d’urbanisme au titre du changement de destination à laquelle cette transformation pourra être soumise, la transformation d’un local d’habitation en meublé de tourisme est constitutive d’un changement d’usage soumis à autorisation. Ainsi, la location en meublé touristique peut constituer à la fois un changement de destination au titre du droit de l’urbanisme et un changement d’usage au titre du droit de la construction et de l’habitation.

L’AUTORISATION DE CHANGEMENT DE DESTINATION

Il résulte des dispositions des articles R151-27 et 151-28 du Code de l’urbanisme que l’hébergement touristique est une sous-destination de celle de commerce et activités de service, distincte de celle d’habitation. Par conséquent, la location en meublé touristique d’un local à usage d’habitation constitue un change- ment de destination au titre du droit de l’urbanisme soumise à autorisation, que ce changement soit accompagné ou non de travaux.
À ce titre, on notera que, si le bien immobilier est soumis au régime de la copropriété, il conviendra de vérifier également, à la lecture du règlement de copropriété, que la location en meublé de tourisme, qui revêt donc un caractère commercial, n’est pas incompatible avec la destination de l’ensemble immobilier qui serait en totalité et exclusivement destiné à un usage d’habitation.
Toutefois, il est intéressant de rappeler que le Conseil constitutionnel avait déclaré contraire à la Constitution, l’article 19 de la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové du 24 mars 2014, comme portant une atteinte disproportionnée au droit de propriété et à la liberté contractuelle. Cet article 19 aurait permis à l’assemblée générale des copropriétaires d’un immeuble de décider de soumettre discrétionnairement à son accord préalable « toute demande d’autorisation de changement d’usage d’un local destiné à l’habitation faisant partie de la copropriété par un copropriétaire aux fins de le louer pour de courtes durées à une clientèle de passage ».

L’AUTORISATION DE CHANGEMENT D’USAGE

L’article L631-7 du Code de la construction précise que « le fait de louer un local meublé destiné à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile constitue un changement d’usage », et, en vertu de cette même disposition, ce changement d’usage est soumis à autorisation préalable.
Cette autorisation est exigée dans les communes de plus de 200 000 habitants et à celles des départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val- de-Marne.
Elle peut être étendue également aux autres communes par décision de l’autorité administrative sur proposition du maire ou, pour les communes appartenant à une zone d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants dont la liste est fixée par le décret, par une délibération de l’organe délibérant de l’établisse- ment public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d’urbanisme ou, à défaut, du conseil municipal. Cette autorisation peut encore être rendue applicable sur une partie seulement de la commune.

DEUX RÉGIMES DISTINCTS

Dans les communes concernées, l’autorisation de changer un local à usage d’habitation en meublé de tourisme peut résulter de deux régimes distincts :

• soit le régime facultatif d’autorisation tempo- raire créé par la loi ALUR du 24 mars 2014, à l’article L 631-7-1 A du Code de la construction et de l’habitation. Cette disposition accorde aux communes ou aux établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de plan local d’urbanisme, la faculté d’instaurer un régime d’autorisation limité dans le temps, permettant à une personne physique de louer son local d’habitation en meublé de tourisme ;

• soit le régime de droit commun résultant des articles L 631-7 et L 631-7-1 du Code de la construction et de l’habitation.

Cette autorisation n’est exigée que dans le cas de la transformation d’un local d’habitation en meublé de tourisme. Il appartient à chaque commune concernée par la réglementation de fixer les conditions dans les- quelles les autorisations sont délivrées.

L’administration pourra exiger du demandeur qu’il fournisse une compensation lors du dépôt de la demande d’autorisation de changement d’usage. Cette compensation consiste à proposer, en échange de l’obtention d’une autorisation de changement d’usage, la transformation en habitation d’un local appartenant au demandeur et ayant un autre usage. La conversion à l’habitation du local offert en compensation devra être concomitante au changement d’usage du local d’habitation, c’est-à-dire en relation directe avec le change- ment d’usage.

EXIGENCE DE COMPENSATION

L’autorisation de changement d’usage est attachée à la personne qui l’a sollicitée et n’est donc pas transmissible en cas de vente, par exemple. L’autorisation devient caduque et le bien doit retrouver son usage d’habitation si le bénéficiaire cesse son activité ou s’il quitte le local. L’autorisation aura un effet réel si elle est subordonnée à une compensation.

Pour ne citer que Bordeaux, le Règlement municipal fixant les conditions de délivrance des autorisations de changement d’usage de locaux d’habitation et déterminant les compensations sur la commune, entré en vigueur le 1er mars 2018, précise que toute location en meublé de tourisme d’un logement est soumise à compensation. Les locaux proposés en compensation devront être de qualité et de taille équivalente au loge- ment loué en meublé de tourisme et situé dans la même zone définie par ledit règlement. Les locaux situés en rez-de-chaussée ne pourront pas servir de compensa- tion. Cette exigence de compensation et les conditions de celle-ci constitue un réel obstacle à la location en meublé de tourisme pour les communes concernées. Les dispositions du Code de la construction et de l’habitation relatives aux changements d’usage étant d’ordre public, il n’est pas possible d’y déroger. Le non-respect de la règlementation est sanctionné sur le plan civil par la nullité du contrat de location. Toute per- sonne qui enfreint ces dispositions encourt une amende civile qui ne peut excéder 50 000 € et l’obligation de remise en état des lieux.

Sur le plan pénal, les changements d’usage irréguliers sont sanctionnés par une peine d’emprisonnement d’un an et une amende de 80 000 €, ou l’une d’entre elles. Hormis les autorisations de changement de destination et d’usage, le Code du tourisme règlemente également la location meublée de courte durée.

LA DÉCLARATION PRÉALABLE EN MAIRIE

L’article L 324-1-1 I du Code du tourisme dispose que « toute personne qui offre à la location un meublé de tourisme (…) doit en avoir préalablement fait la déclaration auprès du maire de la commune où est situé le meublé ». En outre, dans les communes où le changement d’usage est réglementé, la commune peut décider de soumettre à une déclaration préalable soumise à enregistrement auprès de la mairie toute location d’un meublé de tourisme.
Le régime des autorisations et déclarations de la location en meublé de tourisme, auquel s’ajoute la crise sanitaire et économique liée à la Covid-19, et les restrictions qui l’accompagnent, obligeront sans doute de nombreux propriétaires de biens situés notamment dans les grandes agglomérations, à se tourner vers la location meublée de longue durée.

Par Me Tiphaine BISSARETTE notaire à Mios.

 

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