LE LEGS AU PROFIT D’UNE ASSOCIATION
Les associations peuvent recevoir des dons et des legs afin de les aider à développer leurs missions. L’association doit répondre à certains critères pour recevoir un legs sans autorisation, ou pour bénéficier d’une exonération de droits de succession. Le legs peut être fait par testament authentique (devant notaire) ou de façon plus courante par testament olographe. Dans tous les cas, il faut confier son testament à un notaire pour l’enregistrer au Fichier de dernières volontés et pour en assurer la conservation. Réserver tout ou partie de sa succession à une bonne cause nécessite donc de prendre certaines précautions pour être le plus efficace possible.
QUE PEUT-ON LÉGUER ?
Toute personne a la possibilité de transmettre son patrimoine après sa mort à une association habilitée à recevoir des legs. En présence d’héritiers réservataires (enfants ou conjoint) qui ont le droit à une part minimale de la succession, le legs ne pourra porter que sur la quotité disponible, ce qu’on peut léguer librement. En l’absence d’héritiers réservataires, il est possible de disposer de son patrimoine sans restriction. Une personne peut léguer à une association :
– l’ensemble de son patrimoine (legs universel) ;
– une fraction de son patrimoine (la moitié, un quart…) ;
– un bien déterminé : une somme d’argent, des titres, des bijoux, des œuvres d’art, des immeubles.
Il sera plus simple pour une association de recevoir des liquidités qu’un bien immobilier qu’elle devra vendre, ce qui prend du temps et entraînera des frais. Il est déconseillé de multiplier les petits legs à de nombreuses associations, car chacune va devoir assumer les formalités, ce qui prend du temps pour une petite somme. Attention aussi de ne pas multiplier le nombre d’associations légataires universelles, le règlement de la succession n’en sera que plus difficile, les associations devant toutes réaliser les mêmes démarches, et donner leur accord à la vente de chaque bien.
COMMENT PEUT-ON LÉGUER ?
Outre les conditions de validité du testament à respecter (un écrit de la main du testateur, daté et signé) il est impératif que le legs ait un bénéficiaire. Les litiges portent principalement sur les legs faits au profit des associations dont le testateur ignorait la dénomination exacte. Les juges doivent alors interpréter la volonté du testateur pour déterminer l’organisme gratifié. Par exemple, le legs consenti à la « Fondation pour la recherche contre le Sida » (qui n’existe pas) a été attribué à la « Fondation mondiale de recherche et prévention du Sida ». Le legs consenti à « une association de bienfaisance pour des enfants sans famille et malheureux » est nul faute de pouvoir déterminer le bénéficiaire. Le testateur doit désigner lui-même le légataire. Il est interdit de faire un legs où la désignation du légataire est confiée à un tiers. Par exemple, a été annulé le legs rédigé comme suit : « je ne veux pas que ma famille hérite, à vous de faire don à qui vous voudrez ». En revanche, a été validé le legs qui affectait les biens de la testatrice « un quart à M. et Mme C. et le reste pour la recherche médicale au bon gré de Maître P. ». La jurisprudence admet la validité du legs assorti de la charge de transmettre son bénéfice à une personne qui sera déterminée par le légataire dans une catégorie de bénéficiaires déterminables. Par exemple, il est possible de prévoir de léguer une partie de sa succession à une association à choisir par le légataire parmi une catégorie d’associations (recherche médicale, protection de la faune…). C’est une solution lorsque le testateur veut adresser un legs à une association à créer ou une fondation qui n’existe pas au jour de l’ouverture de sa succession ou qui n’aurait pas lors de sa création la reconnaissance d’utilité publique.
QUELS ORGANISMES PEUVENT RECEVOIR UN LEGS ?
Les associations ne sont pas toutes autorisées à recevoir des legs. Cette autorisation est réservée aux « grandes associations » reconnues d’utilité publique, aux associations culturelles, de bienfaisance ou celles qui soutiennent la recherche médicale ainsi que celles déclarées depuis trois ans au moins et qui sont d’intérêt général à condition de remplir certaines missions. Le legs destiné à une association est accepté librement par elle. Le notaire est tenu de déclarer le legs au préfet du département où l’association a son siège social. Lequel va vérifier que l’association peut effectivement recevoir son legs et rendre sa décision dans les 4 mois suivants. L’absence de réponse valant acceptation.
QUELLE EST LA FISCALITÉ APPLICABLE AU LEGS ?
Les legs au profit de ces organismes bénéficient d’une exonération de droits de succession ; c’est notamment le cas des organismes d’utilité publique ou d’intérêt général dont les ressources sont affectées à des œuvres d’assistance (orphelinat), à la défense de l’environnement naturel ou à la protection des animaux ou ayant un caractère philanthropique, éducatif, social, humanitaire, sportif, familial, culturel, ou encore les associations cultuelles ou congrégations … Dans le cas où l’association ou la fondation d’utilité publique n’utilise pas ses ressources pour les causes mentionnées ci-dessus, la fiscalité successorale entre frère et sœur est applicable (35 % jusqu’à 24 430 euros ; 45 % au-delà de cette somme). Pour les autres associations, le taux est fixé à 60 % sur la totalité de la valeur du legs. L’exonération des droits de succession bénéficie aux organismes de même nature établis dans un État membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale sous certaines conditions.
COMMENT OPTIMISER LA FISCALITÉ ?
Lorsque le défunt souhaite léguer à une personne avec laquelle il n’a pas de lien de parenté ou encore un parent éloigné (cousin, neveu), il peut limiter les droits de succession en gratifiant une association caritative. C’est la technique du legs net de droits. Si vous laissez 100 000 euros à votre meilleur ami, il paiera 60 % de droits de succession, il ne percevra que 40 000 euros. En instituant une association caritative, exonérée de droits de mutation, légataire universelle, à charge pour elle de délivrer un legs net de 40 000 euros au gratifié, elle recevra ces 100 000 euros sans droits de succession, elle paiera à votre ami les 40 000 euros prévus et supportera les droits de succession de 60 % du legs soit 24 000 euros (60 % x 40 000 = 24 000). L’association aura déboursé 64 000 euros sur les 100 000 euros reçus et en conservera 36 000 et votre meilleur ami aura reçu ses 40 000 euros.
Par Me Agathe COQUEMA, notaire à Bordeaux