LOI ALUR : PATIENCE DES CANDIDATS, VENDEURS ET ACQUÉREURS

Entrée en vigueur le 27 mars 2014, la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014, dite loi ALUR (Accès au Logement et pour un Urbanisme Rénové), a réformé la pratique notariale du fait de son fort impact sur les cessions de biens et droits immobiliers soumis au statut de la copropriété. Elle s’impose à toute cession de lots de copropriété, peu importe son affectation (tant que l’immeuble est au moins partiellement destiné à l’habitation) et sans distinction de la qualité de l’acquéreur (personne physique ou morale).

Parmi les nombreux objectifs de la loi, il faut souligner l’obligation d’information accrue pesant sur les vendeurs de lots de copropriété, en application des dispositions de l’article L. 721-1 et suivants du Code de la construction et de l’habitation. C’est ainsi que le rédacteur de tout avant-contrat doit désormais réunir nombre de pièces permettant à l’acquéreur de s’engager en ayant parfaite connaissance des informations relatives à la situation juridique, financière et même structurelle du bâtiment dont dépend(ent) le(s) lot(s) objet(s) de la vente.

CONCERNANT L’ORGANISATION DE L’IMMEUBLE, LE SYNDIC DOIT TENIR À DISPOSITION DES COPROPRIÉTAIRES :

– la fiche synthétique : similaire à la carte d’identité de l’immeuble, elle est aujourd’hui devenue obligatoire pour les copropriétés et reprend les principales informations telles que les données financières et techniques, et notamment le numéro d’immatriculation de la copropriété ;

– les procès-verbaux d’assemblée générale de copropriété des trois dernières années ;

– le carnet d’entretien de l’immeuble, qui regroupe notamment les informations relatives à l’assurance des parties communes, aux divers contrats d’entretien et abonnements de la copropriété, aux éventuels employés et aux travaux effectués ;

– l’état descriptif de division – règlement de copropriété initial et tous les modificatifs publiés.

La principale difficulté pour les rédacteurs d’avant-contrats consiste à réunir l’ensemble des actes publiés au service de la publicité foncière contenant état descriptif de division – règlement de copropriété de l’immeuble et leurs éventuels modificatifs. Encore à ce jour, il est regrettable que tous les syndics de copropriété ne soient pas en possession de ces pièces.

La pratique consiste donc désormais à lever un état hypothécaire de l’immeuble mis en copropriété afin d’identifier ces actes et en obtenir copie auprès des détenteurs des minutes avant toute régularisation d’avant-contrat.

Concernant l’aspect financier de la copropriété, le syndic doit délivrer une note de renseignements reprenant :

CONCERNANT L’ASPECT FINANCIER DE LA COPROPRIÉTÉ, LE SYNDIC DOIT DÉLIVRER UNE NOTE DE RENSEIGNEMENTS REPRENANT :

– le montant des sommes payées par le vendeur sur les deux derniers exercices comptables (au titre des charges courantes du budget prévisionnel et des charges hors budget prévisionnel, c’est-à-dire le montant des travaux votés) ;

– le montant des sommes qui seront dues par l’acquéreur au syndic ;

– le montant total des sommes dues au syndicat au titre des impayés de charges et les dettes envers les fournisseurs ;

– le cas échéant, le montant total porté au compte du vendeur au titre du fonds travaux concernant le lot vendu ainsi que le montant de la dernière cotisation (ce fonds travaux n’est obligatoire que pour les copropriétés dont l’immeuble a été achevé depuis plus de 5 ans et pour celles formées d’au moins 10 lots).

Enfin, sur l’aspect structurel de l’immeuble, l’acquéreur doit avoir la possibilité de s’assurer des caractéristiques techniques du bâtiment dans lequel il achète un lot de copropriété d’où la nécessité de lui communiquer, s’il a été établi, le diagnostic technique global. Ce diagnostic, visé à l’article L. 731-1 du Code de la construction et de l’habitation, constitue un audit des caractéristiques de l’immeuble et permet d’informer les copropriétaires sur l’état apparent des parties communes et des équipements communs et sur les éventuels travaux qui permettraient d’améliorer le bâtiment ainsi que leur coût.

IL FAUT TOUTEFOIS NOTER QUELQUES EXCEPTIONS :

– lorsque l’acquéreur est déjà copropriétaire dans l’immeuble, seules les informations financières doivent lui être délivrées. En effet, du fait de sa qualité de copropriétaire, il dispose déjà de toutes les autres informations ;

– en cas de cession d’un lot annexe, tel qu’un emplacement de parking ou un local (cave, cellier, garage, grenier…), l’acquéreur ne se verra pas remettre les procès-verbaux d’assemblée générale des trois dernières années, le carnet d’entretien ni le diagnostic technique global.

L’article L. 721-2 du Code de la construction et de l’habitation précise que l’intégralité des pièces énumérées ci-dessus doit être portée à la connaissance de l’acquéreur préalablement à la signature de tout avant-contrat, sur tous supports et par tous moyens.

Cette remise peut donc intervenir en mains propres, sur clé USB ou encore faire l’objet d’un envoi dématérialisé avec l’accord de l’acquéreur. Il est également possible de les annexer à l’avant-contrat du projet d’acte définitif.

La communication des « pièces loi ALUR » a toute son importance car elle conditionne pour l’acquéreur l’ouverture de sa faculté de rétractation prévue à l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation. En effet, le délai de 10 jours de la loi SRU ne commence à courir qu’à compter du lendemain de la remise desdites pièces. En l’absence d’avant-contrat, le projet de l’acte authentique de vente doit être notifié à l’acquéreur, permettant ainsi l’ouverture de son délai de réflexion. Cet envoi doit être accompagné de pièces relatives à l’organisation de l’immeuble, du diagnostic technique global et du montant total des sommes dues au syndicat au titre des impayés de charges et du montant des dettes envers les fournisseurs. Si le respect rigoureux de ce formalisme s’impose au regard de la mise en œuvre de la faculté de rétractation, il est regrettable que le législateur n’ait prévu aucune sanction lorsque que la mutation n’entre pas dans le champ d’application de la loi SRU.

Certes, pour le vendeur d’un lot de copropriété, cette réforme représente des contraintes, notamment l’allongement des délais pour régulariser un avant-contrat ou les éventuels frais liés à la délivrance des pièces exigées par la loi (même si les frais facturés par les syndics de copropriété ont été plafonnés). Cependant, en renforçant de façon considérable l’information délivrée aux acquéreurs, on peut supposer que le nombre de litiges liés parfois au manque de transparence des vendeurs sur la situation financière d’une copropriété ou encore sur l’absence de communication des règles de fonctionnement applicables dans un immeuble soumis au statut de la copropriété va tendre à la baisse.

Largement critiquée lors de sa promulgation, notamment du fait de son application échelonnée, incertaine (renvoyant à des décrets d’application à paraître) et laborieuse pour la pratique notariale, la loi ALUR est aujourd’hui saluée par l’ensemble des acteurs – vendeur, acquéreur, agent immobilier, notaire, syndic – qui interviennent lors de la cession d’un lot de copropriété.

 

Par Me Albane LESUEUR

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