La division foncière

Attractive pour optimiser son patrimoine foncier, la division foncière n’en est pas moins réglementée et certaines vérifications d’usage sont indispensables à son bon déroulement.

Avec environ 1 200 000 transactions en 2021, le marché immobilier a atteint un record absolu. Maisons, appartements, terrains à bâtir, aucun bien n’a échappé à cette dynamique. Face à une telle demande, certains ont pu y voir l’opportunité d’optimiser leur patrimoine foncier par le découpage immobilier. Attractive, la division foncière n’en est pas moins réglementée et certaines vérifications d’usage sont indispensables à son bon déroulement.

 

A/ LA DIVISION FONCIÈRE DE L’IMMEUBLE BÂTI

• Les divisions interdites

L’article L. 111-6-1 du Code de la construction et de l’habitation dispose que sont interdites :

– les divisions par appartements d’immeubles qui sont frappés d’une interdiction d’habiter, ou d’un arrêt de péril, ou sont déclarés insalubres. Ainsi la mise en copropriété d’un immeuble frappé de péril est interdite sauf à effectuer les travaux permettant d’obtenir la mainlevée de l’arrêté ;

– les divisions d’immeuble en vue de mettre à disposition des locaux à usage d’habitation d’une superficie et d’un volume habitables inférieurs respectivement à 14 m2 et à 33 m3, ou qui ne sont pas pourvus d’une installation d’alimentation en eau potable, d’une installation d’évacuation des eaux usées ou d’un accès à la fourniture de courant électrique, ou qui n’ont pas fait l’objet de diagnostics amiante en application de l’article L. 1311-1 du Code de la santé publique et risque de saturnisme lorsque l’immeuble est soumis aux dispositions de l’article L. 1334-5 du même code. De ce fait, lors de la division d’une unité foncière en vue du détachement d’une construction (hangar, remise, etc.) pour laquelle l’acquéreur a obtenu un permis de construire afin d’édifier un immeuble à usage d’habitation, le vendeur doit procéder aux travaux permettant au bien d’être raccordé à l’ensemble des réseaux.

• La division au regard des règles d’urbanisme

La création de nouveaux logements dans un immeuble bâti existant, implique l’obtention préalable d’une autorisation d’urbanisme, arrêté de non-opposition à déclaration préalable ou permis de construire si elle suppose :

– un changement de destination et/ou la réalisation de travaux modifiant l’aspect extérieur ou les structures porteuse du bâtiment,

– ou la réalisation de travaux créateurs de surface de plancher ou d’emprise au sol.

En dehors de ces cas, aucune autorisation d’urbanisme n’est nécessaire. Pour autant, cela ne signifie pas que la division soit libre, car le propriétaire ne peut s’affranchir :

– de la réglementation d’urbanisme applicable dans la zone : certains PLU imposent la réalisation d’aires de stationnement. Elles devront être réalisées prioritairement sur le terrain d’assiette du bien appartenant au propriétaire-diviseur ou dans un environnement immédiat. À défaut, il devra obtenir une concession à long terme dans un parc public de stationnement, ou procéder à l’acquisition des places dans un parc privé de stationnement ;

– des décisions prises par les établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière d’habitat et qui peuvent imposer l’obtention d’un permis de diviser (article L 121-18 du Code de la construction et de l’habitation) ;

– des plans de prévention des risques. Ainsi, le règlement qui s’applique sur le territoire communal délimité par le plan de zonage des Plans de Prévention du Risque Inondation de la Garonne interdit la création de logement dans les zones à risque élevé.

Tel peut être le cas, d’une maison dans laquelle il a été procédé à des aménagements qui n’impliquaient pas l’obtention préalable d’une autorisation d’urbanisme (les services concernés n’ont donc pas été saisis) mais qui aboutissent à la création d’une deuxième unité d’habitation.

• La division et l’occupation du bien

Lorsque le propriétaire d’un immeuble comprenant plusieurs appartements entend le diviser dans le cadre de la vente d’un/des lots, il convient de se préoccuper de l’occupation du bien. En effet, la loi du 31 décembre 1975 donne un droit de préemption aux locataires ou occupants de bonne foi, de locaux destinés en tout ou partie à l’habitation sur la première vente consécutive à une modification de la situation juridique de l’immeuble, que constitue soit la division initiale du bien, soit sa subdivision, dans un sens matériel ou juridique. Le droit de préemption du locataire s’exerce en cours de bail ; s’il n’achète pas, il n’a pas l’obligation de quitter les lieux. D’autre part, si la division a pour objectif la vente d’un local à usage commercial , le locataire de ce dernier bénéficie également d’un droit de préférence (article L 145-46-1 du Code de commerce). Ce qui n’est pas le cas lors de la cession globale d’un immeuble comprenant des locaux commerciaux.

 

B/ LA DIVISION FONCIÈRE D’UN TERRAIN

Nous envisageons ici la division d’une unité foncière portant sur un terrain destiné à être bâti. L’hypothèse courante étant celle du particulier propriétaire de sa maison sur une parcelle de taille relativement importante et qui souhaite en détacher une partie afin de la vendre en tant que terrain à bâtir. Depuis le 1er octobre 2007, la procédure de lotissement s’applique dès le premier détachement en vue d’implanter des bâtiments. Il convient donc de déterminer la nature de l’autorisation nécessaire en ayant pris soin préalablement de vérifier si le bien n’est pas déjà situé dans le périmètre d’un lotissement.

• La division d’un bien déjà situé dans un lotissement

 Être propriétaire dans un lotissement impose de se conformer aux règles contenues dans deux documents, à savoir :

– le règlement du lotissement : il est relatif aux règles d’urbanisme applicables dans le périmètre du lotissement, telles que celles portant sur : l’implantation des bâtiments, l’aspect extérieur des constructions, les clôtures, la superficie et les dimensions du ou des lots, la subdivision des lots…

– le cahier des charges : c’est un document contractuel, qui contient des règles de nature privée telles que la pose des antennes, les obligations de débroussaillement, la nature des clôtures autorisées mais qui bien souvent renferme de véritables règles d’urbanisme. L’ensemble de ces règles peut être un frein au projet de division.

Toutefois, depuis la loi ALUR du 24 mars 2014 et la loi ELAN du 23 novembre 2018, l’article L 442-9 du Code de l’urbanisme dispose « les règles d’urbanisme contenues dans les documents du lotissement, notamment le règlement, le cahier des charges s’il a été approuvé ou les clauses de nature réglementaire du cahier des charges s’il n’a pas été approuvé, deviennent caduques au terme de dix années à compter de la délivrance de l’autorisation de lotir si, à cette date, le lotissement est couvert par un plan local d’urbanisme ou un document d’urbanisme en tenant lieu… ». Ainsi, en ce qui concerne les lotissements de plus de dix ans, c’est le plan local d’urbanisme qui gouverne la délivrance des autorisations d’urbanisme. La caducité des règles d’urbanisme contenues dans les documents du lotissement, souvent plus stricts que la réglementation locale, a pour objectif de répondre à la problématique du manque de logements disponibles en favorisant la densification des espaces bâtis. Cependant, la règle de caducité au plan urbanistique ne remet pas en cause les droits et obligations régissant les rapports entre les colotis définis dans le cahier des charges. Si ce dernier interdit la subdivision d’un lot, un coloti pourra opposer cette clause au propriétaire-diviseur et ce même s’il a obtenu l’autorisation d’urbanisme adéquate : la division foncière n’est pas réalisable.

Il convient de rappeler :

– que l’action en démolition fondée sur la violation d’une stipulation du cahier des charges se prescrit par 30 ans…

– que les colotis peuvent demander la modification du cahier des charges à la majorité déterminée dans les statuts de l’ASL.

• L’autorisation d’urbanisme autorisant la division

Puisque dès le premier détachement d’un terrain à bâtir, la procédure du lotissement trouve à s’appliquer, il reste à  déterminer le régime applicable. Il ressort de l’article R 421-19 du Code de l’urbanisme deux critères alternatifs :

– situation du bien : situé dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable, dans les abords des monuments historiques, dans un site classé ou en instance de classement = permis d’aménager ;

– création de de voies, d’espaces ou d’équipements communs à plusieurs lots destinés à être bâtis et propres au lotissement = permis d’aménager.

Donc, les lotissements qui ne sont pas soumis à un permis d’aménager en vertu des critères précités sont soumis   déclaration préalable.

Les deux régimes sont très différents tant en ce qui concerne, à savoir :

– le dossier de demande et les délais d’instruction,

– la vente du ou des terrains,

– les obligations du propriétaire lotisseur.

L’obligation principale du lotisseur titulaire d’un permis d’aménager est la viabilisation du terrain (desservi par les principaux réseaux, tels que l’eau, l’électricité, le gaz ou encore le tout-à-l’égout). Cependant, dans le cas évoqué du propriétaire qui entend détacher un seul terrain à bâtir de sa propriété (lotissement uni-lot) sans voies/équipements communs (= déclaration préalable) mais dont la localisation le soumet à la procédure des permis d’aménager, il s’agira d’une demande de permis d’aménager sans programme des travaux. Il est à noter que certaines divisions ne sont pas constitutives de lotissement et sont donc exonérées des procédures d’autorisations évoquées ci-dessus.

Il en est ainsi de :

– la division d’un terrain au profit d’un propriétaire contigu,

– la division au profit de personnes ayant obtenu un permis de construire ou d’aménager portant sur la création d’un groupe de bâtiments ou d’un immeuble autre qu’une maison individuelle (procédure dite de la division primaire),

– le détachement de terrains conformément à un permis de construire valant division (permis qui a pour objet de regrouper en un seul permis l’autorisation de diviser et l’autorisation de construire).

 

LA DIVISION MATÉRIALISÉE PAR UN GÉOMÈTRE

Qu’il s’agisse de la division d’un immeuble bâti ou d’un terrain, l’intervention d’un géomètre est indispensable.

Concernant la division en vue de détacher un terrain à bâtir, le géomètre établira un document d’arpentage afin d’annuler l’ancienne parcelle, créer les nouvelles et mettre à jour le plan cadastral. Il peut être procédé de la même façon dans le cas de la division d’un immeuble bâti si le régime de la copropriété ne s’impose pas, c’est-à-dire s’il n’existe pas de parties communes. Dans le cas contraire, la mise en place de la copropriété passera par l’établissement d’un état descriptif de division qui déterminera chaque lot et permettra la répartition des charges entre les copropriétaires et par l’établissement d’un règlement. La création d’une copropriété peut apparaitre comme un frein pour certains au projet de division.

 

Écrit par Me Anne Puigcercos

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