Travaux de construction et autorisation d’Urbanisme

Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement. (Nicolas Boileau-Despréaux).
En matière de vente immobilière, la légalité et la régularité des travaux de construction est une question habituelle que doit gérer le notaire chargé du dossier de vente.

De manière très concrète, dans le cadre de l’obligation d’information par rapport à l’acquéreur, le vendeur doit l’informer des travaux de construction concernant le bien objet de la vente. Il faut donc faire l’historique de ce bien. Comment le bien a-t-il été construit initialement ? Des travaux ont-ils été effectués depuis ? Ce sont les questions qui doivent être posées lors de chaque dossier de vente.
Étant donné l’étendue du sujet, il est volontairement limité à la construction de maison à usage d’habitation et des problématiques rencontrées quotidiennement par les notaires.
Concernant les travaux de construction portant sur une maison à usage d’habitation, nous rencontrons principalement deux autorisations d’urbanisme : le permis de construire et la déclaration préalable.

LES DIVERSES AUTORISATIONS D’URBANISME LA PROCÉDURE POUR LA DÉLIVRANCE D’UN PERMIS OU D’UNE DÉCISION DE NON-OPPOSITION À DÉCLARATION PRÉALABLE

La Demande
Le maître de l’ouvrage et son architecte éventuel doivent identifier la liste des pièces exigées par les services instructeurs et préparer un dossier complet. Une fois constitué, il est déposé à la mairie du lieu de situation de l’immeuble. Le délai d’instruction ne commence à courir qu’à compter de la réception d’un dossier complet en mairie.

Le Délai

Le code de l’urbanisme prévoit un délai de droit commun et des hypothèses de prorogation exceptionnelle du délai d’instruction.

En application de l’article R423-23 du code de l’urbanisme :

« Le délai d’instruction de droit commun est de :
– un mois pour les déclarations préalables ;
– deux mois pour les demandes de permis de démolir et pour les demandes de permis de construire portant sur une maison individuelle ;
– trois mois pour les autres demandes de permis de construire et pour les demandes de permis d’aménager. »

Forme décision

La réponse de l’administration sur la demande d’autorisation peut être soit expresse, soit tacite. Dans le cas d’une acceptation de la déclaration préalable, la mairie délivre une décision de non-opposition.

À défaut de notification d’une décision expresse dans le délai d’instruction, le silence gardé par l’autorité compétente vaut en principe autorisation d’urbanisme (L424-2 et R424-1 du code de l’urbanisme. Le pétitionnaire peut demander la confirmation expresse que sa demande n’a pas reçu d’opposition de la part des services instructeurs. (R424-13 du Code de l’urbanisme). S’il s’agit d’une acceptation tacite de la déclaration préalable.

Durée de validité

Une autorisation d’urbanisme accorde des droits à son bénéficiaire, qui doivent être mis en œuvre dans un délai de trois ans, et les travaux engagés ne doivent pas être suspendus pendant une année au risque d’entraîner la péremption de l’autorisation d’urbanisme. Afin d’éviter cela, le bénéficiaire de l’autorisation peut demander la prorogation de son activité. La durée de validité de trois ans peut faire l’objet d’une prorogation pour un an, et ce à deux reprises (art. R. 424-21 C. urb.), soit au total cinq ans. Le délai de validité est suspendu en cas de recours des tiers.

Permis de construire

L’autorisation emblématique en matière d’urbanisme est bien entendu le permis de construire. Dans la pratique ce document n’est pas difficile à obtenir de la part des parties. Son champ d’application est défini négativement pour les constructions nouvelles (R421-1 du code de l’urbanisme). Tandis que pour les travaux sur des constructions existantes, le champ d’application est délimité à l’article R421-14 du Code de l’urbanisme.

Les travaux soumis à Déclaration préalable

Ce document est plus difficile à obtenir, tout simple- ment parce qu’il arrive encore que les travaux compris dans le champ d’application de la déclaration préalable n’aient fait l’objet d’aucune déclaration. Le champ d’application de la déclaration préalable est délimité à l’article R421-9 à R421-12 du code de l’urbanisme pour les constructions nouvelles et R421-14 et R421-17-1 du code de l’urbanisme pour les travaux sur construction existante. Les cas que l’on va rencontrer fréquemment sont les suivants : agrandissement ou construction d’une annexe ; construction d’un abri ; construction d’une piscine ; portes, fenêtres, toiture ; aménagement d’un garage, ou d’un sous-sol…

Agrandissement ou construction d’une annexe

Une déclaration préalable de travaux est exigée lors de la création d’une emprise au sol ou d’une surface de plancher de plus de 5 m2 et inférieures ou égales à 20 m2. En zone urbaine d’une commune couverte par un plan local d’urbanisme (PLU) ou un document assimilé, il est possible de créer jusqu’à 40 m2 d’extension en déposant une Déclaration préalable. Le cas le plus souvent rencontré est celui du garage transformé en pièce d’habitation.

Il faut savoir qu’aucune autorisation d’urbanisme n’est requise au titre d’un changement de destination dans la mesure où le garage est réputé avoir la même destination que le local principal à destination d’habitation. En outre, une déclaration préalable devra être déposée si cette transformation a pour conséquence de trans- former de la surface close et couverte en surface de plancher.

Construction d’un abri, garage

Cette nouvelle construction est indépendante du bâti- ment d’habitation. Une déclaration préalable est exigée quand l’emprise au sol de cette construction est supérieure ou égale à 5 m2 et qu’elle répond à un ou plusieurs des critères suivants : emprise au sol inférieure ou égale à 20 m2 ; surface de plancher inférieure ou égale à 20 m2 ; hauteur au-dessus du sol inférieure ou égale à 12 mètres.

Construction d’une piscine (R. 421-9, f) du code l’urbanisme)
Est soumise à déclaration préalable :

– la construction d’une piscine non couverte quand la superficie de bassin est supérieure à 10 m2 et inférieure ou égale à 100 m2 ;

– la construction d’une piscine couverte, si la couverture fixe ou mobile doit avoir une hauteur au-dessus du sol inférieur à 1,80 m ;

– le tout en conformité avec les règles d’urbanisme.

Portes, fenêtres, toiture, volets

S’agissant de la modification de l’aspect extérieur, l’article R. 421-17 a du code de l’Urbanisme prévoit que doivent être précédés d’une déclaration préalable les travaux exécutés sur les constructions existantes, ayant pour effet de modifier l’aspect extérieur d’un bâtiment existant. Voici les cas que l’on rencontre fréquemment : – créer une ouverture (porte, fenêtre, velux) ;

– changer une porte, une fenêtre ou un velux par un autre modèle ;
– changer des volets (matériau, forme ou couleur) ;
– changer la toiture.

Une fois l’autorisation d’urbanisme obtenue, il est important de rappeler au bénéficiaire que cette autorisation n’est pas définitive. Il y a des délais de recours et de retrait à purger.

L’AUTORISATION D’URBANISME DÉFINITIVE À COMPTER DE LA PURGE DES RETRAITS ET RECOURS

Risque de retrait de l’administration

Une autorisation d’urbanisme peut faire l’objet d’un retrait par l’autorité qui l’a délivrée. Le délai de prin- cipe pour prononcer le retrait est de 3 mois suivant la date de la décision de l’autorité (L424-5 du code de l’urbanisme). Le retrait d’une autorisation a pour effet de le faire disparaitre juridiquement pour l’avenir comme pour le passé (L.240-1 C. des relations du public avec l’administration).

Purge du délai de recours des tiers par l’affichage de l’autorisation d’urbanisme

L’affichage de l’autorisation d’urbanisme est une étape essentielle pour faire courir le délai de recours des tiers (R424-15). Aux termes de l’article R. 600-2 du Code de l’urbanisme, « le délai de recours contentieux à l’encontre d’une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d’un permis de construire, d’aménager ou de démolir court à l’égard des tiers à compter du premier jour d’une période continue de deux mois d’affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l’article R. 424-15 ». Le bénéficiaire de l’autorisation doit donc être en mesure de justifier, de prouver ledit affichage. La preuve peut se faire par tout moyen. Les notaires conseillent à leurs clients de procéder par constats d’huissier qui est le meilleur moyen de preuve.

Procédure pendant et après les travaux réalisés en conformité avec les autorisations d’urbanisme obtenues

Cette dernière partie est importante au niveau pratique. Ces documents sont ceux qui représentent le plus d’attente concernant le vendeur. Tout simplement parce qu’après l’obtention de l’autorisation d’urbanisme et la réalisation des travaux, il a considéré ses obligations comme remplies. Ce qui n’est pas le cas comme nous le verrons ci-dessous.

Envoi de la déclaration d’ouverture de chantier

L’administration a précisé que la preuve du début d’exécution des travaux résulte, en principe, de la délivrance du récépissé de la déclaration d’ouverture de chantier faite en mairie. Toutefois, lorsque cette déclaration n’a pas été déposée, la preuve peut résulter :

– soit des mémoires des entrepreneurs de maçonnerie ou de terrassement s’ils sont suffisamment probants ; – soit des bons de commande délivrés par les sociétés de construction à condition qu’ils comportent l’indication des acomptes à payer (montant et date) par rap- port à l’état d’avancement des travaux et qu’ils soient appuyés des justifications relatives aux paiements effectués. La déclaration d’ouverture de chantier n’est pas nécessaire pour les travaux rentrant dans le champ d’application de la déclaration préalable. À compter de cette déclaration, les agents du service technique de la commune seront recevables à se rendre sur place pour exercer leur droit de visite et de contrôle du chantier afin de s’assurer des règles de sécurité. Il est également précisé que le simple dépôt d’une déclaration d’ouverture de chantier ne suffit pas à interrompre le délai de péremption des autorisations d’urbanisme, encore faut-il que de véritables travaux aient débuté.

Achèvement des travaux

Une fois les travaux achevés, une Déclaration Attestant l’Achèvement et la Conformité des Travaux (DAACT) doit être établie par le bénéficiaire de l’autorisation d’urbanisme et adressée à la mairie. Il s’agit d’une formalité obligatoire. En pratique, il n’est pourtant pas rare de constater, l’absence d’accomplissement de cette formalité, notamment en matière d’autorisations d’urbanisme auparavant exclues du champ d’application de la DAACT comme les déclarations préalables. La DAACT participe de la sécurisation de la situation juridique du bien. En effet, elle permet le déclenchement de divers délais :

En cas d’absence d’affichage de l’autorisation d’urbanisme cela permet de déclencher les délais de recours (R. 600-3 du Code de l’urbanisme : « Aucune action en vue de l’annulation d’un permis de construire ou d’aménager ou d’une décision de non-opposition à une déclaration préalable n’est recevable à l’expiration d’un délai d’un an à compter de l’achèvement de la construction ou de l’aménagement. Sauf preuve contraire, la date de cet achèvement est celle de la réception de la déclaration d’achèvement mentionnée à l’article R. 462-1 ». Déclenche automatiquement le délai de récolement de 3 ou 5 mois selon que ce récolement est ou non obligatoire (R. 462-6 Code de l’urbanisme).

Pour la jurisprudence, les travaux sont considérés comme achevés quand la construction est en état d’être affectée à l’usage auquel elle est destinée, la preuve de l’achèvement pouvant être rapportée par tous moyens. L’achèvement des travaux est érigé en point de départ des délais d’actions contre l’autorisation d’urbanisme et la conformité de son exécution.

Il en va ainsi :
Des délais d’action pénale : la violation du permis de construire constitue une infraction susceptible de générer une action pénale, qui se prescrivait par trois ans à compter de l’achèvement des travaux, sous réserve que le délai de prescription n’ait pas été interrompu. Le délai de prescription des infractions pénales est désormais de six ans, en suite de la loi du 27 février 2017 portant réforme de la prescription en matière pénale et trouve à s’appliquer aux délais non écoulés à la date du 27 février 2017
Des délais d’action civile (10 ans : art. L. 480-14 du Code de l’urbanisme) : la commune dispose d’une action lui permettant d’exercer l’action civile en vue de faire ordonner la démolition ou la mise en conformité d’un ouvrage édifié ou installé sans l’autorisation exigée par le code de l’urbanisme ou en méconnaissance de cette autorisation, et ce pendant dix ans à compter de l’achèvement des travaux. Des délais d’action administrative (10 ans : art. L. 421-9 Code de l’urbanisme). Le dépôt de la DAACT fixe le point de départ pendant lequel le champ d’application du DPU ne peut s’exercer sur les ventes d’immeuble pendant 4 ans à compter dudit dépôt (article L. 211-4 c) Code de l’urbanisme). En l’absence de DAACT, il faut rappeler que l’achèvement peut se prouver par tous moyens.

Contrôle par l’administration de la conformité administrative
La DAACT fait office d’attestation, pour le bénéficiaire de l’autorisation, de la conformité administrative de la construction avec l’autorisation d’urbanisme. Si aucune contestation n’est émise au bout du délai prévu de 3 à 5 mois, l’administration ne peut plus faire opposition à la DAACT déposée.
En cas de silence de l’autorité compétente, le bénéficiaire de l’autorisation peut demander une attestation de non-contestation à la conformité (R462-10 du code de l’urbanisme). On notera que l’administration ne s’engage pas sur la conformité des travaux. Elle ne s’engage qu’à ne pas avoir contesté la conformité en délivrant l’attestation. Il ne s’agit pas d’un certificat de conformité. Elle ne constitue donc pas, par elle-même, une garantie pour l’acquéreur du bien, la DAACT ne confère ainsi qu’une présomption simple de preuve de la conformité des travaux, qui peut être réfutée par tout autre moyen et empêche l’indemnisation de refus d’instruire une nouvelle demande par le fondement d’une non-conformité de travaux précédents à l’autorisation d’urbanisme obtenue.

Me Guillaume LANAU, notaire à Talence.

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